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Pourquoi le racisme explose au Mali

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Depuis le 17 janvier 2012 et l’attaque de camps militaires dans le nord du pays par des combattants du MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad) et le début de la rébellion, le Mali à vu resurgir un sentiment anti-touareg (et inversement à l’encontre des populations du sud dans le nord) occulté par de nombreux observateurs.

Il n’y a qu’ à lire les commentaires sur les sites d’informations maliennes et écouter les conversations dans les maquis de la capitale pour s’en rendre compte. Agressions de civils, pillages de maison ont été perpétrés à l’encontre de ces populations.

Pour bon nombre de maliens du sud, « les populations touareg n’ont rien à voir avec » eux.

Les commentaires ouvertement racistes s’affichent sur les forums et les portails. Ici, un internaute explicite sa volonté de « massacrer » des touaregs qu’il appelle « espèce ». Autant de révélateurs du manque d’unité nationale au Mali.

Inconsciemment, l’ancien président Amadou Toumani Touré dans l’un de ses derniers discours à la nation le 1er février dernier prononcé à la suite d’émeutes contre des Touaregs dans la ville de Kati, perpétuait ces stéréotypes. Cette allocution avait pourtant pour objectif de pourfendre les amalgames car « les assaillants cherchaient, selon ses mots, à monter les communautés les unes contre les autres » tout en faisant une distinction de races et/ou de peuples entre « (les) frères peuls, touaregs et arabes qui ont choisis de rester avec nous (population du sud). »

Une haine s’est lentement propagée entre les populations alors qu’elles se doivent de combattre ces clichés et amalgames sans tomber dans un simulacre d’unité nationale qui ne parvient pas à cacher un racisme latent. Actuellement, chacun prêche pour sa paroisse, dans un sens, on crie à un possible génocide « comme au Rwanda » de l’autre on craint un retour à « une servitude » des populations noires dans le Nord.

La moitié des maliens n’élisaient pas leurs représentants

Certes, il serait absurde de limiter les maux du Mali à un conflit ethnique même si il s’agit là de veilles rengaines qui ne demandaient qu’à se raviver depuis la dernière rébellion de 2006. Il est à noter que la déliquescence de l’état, la corruption et le clientélisme ont largement participé à l’effondrement du pays. Lors d’un colloque à l’Institut français des relations internationales (Ifri), Laurent Bigot, sous-directeur pour l’Afrique de l’Ouest au ministère français des Affaires étrangères, déclarait à raison que le Mali était «une démocratie de façade où l’on choisit les présidents par cooptation».

Rappelons que même sous la III ème République qui avait amenée la démocratie, plus de la moitié des maliens n’élisaient pas leurs représentants. Le taux de participation n’a jamais franchi la barre des 50 % à quelque élection que se soit. Le processus démocratique s’est toujours éloigné du réel pour se rapprocher de l’utopie.

Les différents mandats d’Alpha Oumar Konaré et d’Amadou Toumani Touré se sont déroulés de la même manière : large consensus autour du chef de l’Etat avec représentation des principaux partis politiques au gouvernement, morcellement des alliances à l’approche des différentes élections puis rassemblement de la majeure partie de la classe politique autour du candidat « le plus fort ».

En matière de politique extérieure, le Mali « entouré de sept voisins, a développé une diplomatie sage et prudente, favorisant l’intégration régionale(…) plutôt que de songer à exporter ses expériences spécifiques qui sont considérées en Occident comme exemplaires (transition démocratique de 1992)» selon la présentation qu’en fait le Ministère des Affaires étrangères français.

Pourtant les nombreuses tentatives de  sauvegarde de la stabilité régionale (chantier pour lequel s’est fortement battu ATT lors de ses deux mandats) ont été mises en échec. Sa volonté de se préserver des crises politique et sociétal qui affectaient les pays voisins (Côte d’Ivoire, Burkina Faso, Niger, et Guinée), l’a poussé a négliger la sécurité intérieure.

La débrouille, seule réponse à la corruption généralisée

Ces éléments ont éloigné le pouvoir du peuple. Celui ci à force de circonvolutions autour de sujet de façade n’a pas permis la construction d’un sentiment politique dans sa population. A la veille du coup d’état, les salles de conférences de Bamako n’étaient jamais silencieuses, car elles subissaient les réunions des différentes familles politiques.  Vide de programme, ces réunions rendaient mal à l’aise les journalistes maliens qui s’interrogeaient sur la communication de ces évènements qui ne produisait ni programme, ni compte rendu, ni propositions.

Etre militant d’un parti politique au Mali signifiait avoir un cousin, ou avoir une quelconque relation avec un haut placé dans le parti. On allait à l’élection pour placer un numéro de son répertoire téléphonique à un haut niveau de l’Etat. Tout comme chaque Bamakois avait une relation dans la police, dans l’administration, ou dans l’armée.

Dans le même temps, les maliens, qui du fait de la pauvreté avaient pris pour habitude de vivre au jour le jour pour trouver « le prix du condiment », c’est-à-dire l’argent nécessaire à acheter deux à trois repas par jour et effectuer ses déplacements s’accommodaient de cette situation.

Le concept de « débrouille », c’est-à-dire se servir de la petite corruption pour subvenir à ses besoins a certainement été inventé au pays de Soundjata.

Comment faire une opération de grande ampleur?

Pays conservateur sans vision politique le Mali se doit dans les plus brefs délais de se réconcilier au Sud. MP22 (Mouvement populaire du 22 mars)/ Front uni pour la restauration de la démocratie ; bérets rouge/bérets verts, les batailles d’égo ont atteint leur apogée entre les mois de mars et juin. Ces combats de coq ont ridiculisé le pays est s’est achevé par l’agression de Diocounda Traoré qui aura montré aux yeux du monde que la situation malienne était ridicule.

Dans son dernier rapport, daté du 24 Septembre, International Crisis Group y va de son pessimisme.

L’ONG déclare qu’ « aucun des trois acteurs qui se partagent le pouvoir, le président intérimaire Dioncounda Traoré, le premier ministre Cheick Modibo Diarra et le chef de l’ex-junte, le capitaine Amadou Sanogo, ne dispose d’une légitimité populaire et d’une compétence suffisantes pour éviter une crise plus aiguë. »

On comprend entre les lignes qu’aucun ne se démarque assez pour porter l’avenir, qu’ aucune épaule n’est assez solide pour soutenir le pays. Comment alors penser à faire une opération de grande ampleur qui est susceptible de rentrer dans la légende Malienne? Le Mali du sud est il prêt à reconquérir le nord même avec une aide internationale?

Kaourou Magassa et Tom Piel

 

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